Parcours

Né en 1949 en Touraine, Jean-Baptiste Leroux s’imprègne très tôt de la lumière  du Val de Loire en même temps que de son patrimoine architectural. Ayant rejoint Paris, il devient directeur artistique de la galerie Nikon à Saint-Germain-des-Prés en 1978, puis dirige la galerie Canon de Beaubourg de 1979 à 1989, ce qui lui permet de partager sa passion avec ses aînés, Robert Doisneau, Jacques-Henri Lartigue, Lucien Clergue…
Une rencontre à Courances en 1985 avec la propriétaire des lieux, Madame de Ganay, le conduit à sa première exposition de photos de jardins. Celle-ci lui ouvre les portes des plus prestigieuses propriétés de France et d’Europe, Versailles, Vaux-le-Vicomte, Sans Souci, Caserte, La Granja, les jardins des Grimaldi… puis celles de Son Altesse Royale le roi Mohammed VI du Maroc. Des échappées vers le Maroc saharien et ses oasis, comme vers les villes de Tanger et Venise lui ouvrent de nouveaux horizons… tout aussi lumineux.

Jean-Baptiste Leroux Photographe Biographie

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BACKSTAGE. Ce matin, il s’est levé tôt. Avant l’aube. A l’hôtel, tout le monde dort. La veille, il a appelé la météo qui lui annonçait de la brume. Il a préparé son sac, ses appareils, ses films. Il a demandé de l’eau chaude pour son thermos, sorti d’on ne sait où un cake anglais. Vite, un coup d’œil à la fenêtre. Gris, mais pas plombé. Un gris intéressant, un gris moutonneux et mobile. Un gris qui va vite, qui court avec le vent. « Vous êtes priés de libérer la chambre avant midi ». Cette information le fait toujours sourire. Il dévale les marches malgré le poids des sacs, dépose le trépied dans le coffre, démarre aussitôt. Son 4 x 4 est complice et ronronne comme un chat. Pas un mot. Pas de radio. Juste lui et le ciel, lui et la route, lui et les nuages qui filent, la lumière qui se fait plus présente. Le miracle qui recommence chaque matin pour celui qui sait voir. A droite, à gauche, une montée, la lumière qui s’amuse à lancer ses pépites. Des rayons ravageurs qui percent les nuages. Juste comme il les aime. Fugaces, à peine un quart de seconde pour un univers de magie. Puis, plus rien. Un virage, un autre. C’est là ! Château-Gaillard… Dans une hanse de la Seine, ce qu’il reste du château de Richard Cœur de Lion. Une ruine sublime perchée sur la pointe de ses remparts sur un piton rocheux. Spectacle ! Les nuages entrent en scène pour un striptease voluptueux. Une danse des sept voiles qui enlace les murailles, les habille d’or scintillant, de rose duveteux, de bleu ouaté, de gris poudreux. Lui, court, vole, escalade, redescend en courant, saisit au vol, n’en perd pas une miette. Puis le soleil prend de la hauteur, la fée lumière a rangé sa baguette. Rideau ! Un autre jour, à Versailles. Il rentrait. Au loin, dans le ciel d’orage, une promesse de quelque chose d’étrange au-dessus du parterre de l’Orangerie. Une lueur divine. Une possible trouée juste au-dessus du bassin. Reflet dans un œil d’or qui ne lui échappe pas. Ailleurs, en Norvège ou au-dessus de la Mer de Glace, un ciel cristallin qui se mire dans l’eau. Où suis-je ? Au ciel, sur la terre, au fond d’un lac limpide ? Partout, il suit des yeux les eaux dormantes, ruisselantes, en cascades, glacées, en miroirs. Partout, il guette les nuages, leur course d’oiseaux migrateurs fascinante. Partout, il traque les lumières rares, obliques, diaphanes, ravageuses, inattendues, filtrées, incandescentes. Partout, d’un clic, pour lui le temps suspend son vol pour ces quelques « instants d’éternité ».

 

Mic Chamblas-Ploton
Journaliste

Texte d’introduction au portfolio de Jean-Baptiste Leroux, « Jeux de miroirs », édité par Higgins